Droit d’auteur : une directive très critiquée

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Mercredi 14 septembre, la Commission européenne a présenté son projet de révision de la directive sur le droit d’auteur. Dès son annonce, celle-ci a reçu un accueil peu chaleureux et très critique.

La révision de la directive sur le droit d’auteur devrait être une évolution pour l’adaptation des droits de propriété intellectuelle aux pratiques sur internet. Mais malgré cette grande ambition et les efforts de Bruxelles, la proposition a reçu un accueil mitigé et de nombreuses critiques de la part des intéressés. Deux nouvelles obligations seraient même très redoutables.

Une obligation de filtrage sur les plateformes de partages

YouTube et Dailymotion sont les premiers concernés dans cette nouvelle révision. Selon la Commission, « la directive sur le droit d’auteur vise à renforcer la capacité des titulaires de droits à négocier et à être rémunérés pour l’exploitation en ligne de leurs contenus sur les plateformes de partages de vidéos telles que YouTube et Dailymotion ». Pour réaliser cela, les plateformes devront alors se doter de « technologies permettant de détecter automatiquement des chansons ou des œuvres audiovisuelles identifiées par les titulaires de droits ». Une directive qui deviendra un vrai coût pour ces plateformes, qui actuellement n’ont aucune obligation de filtrage. En effet, considérés comme des hébergeurs, ils ne peuvent retirer des vidéos que si elles sont signalées par les titulaires. Mais cette annonce a déjà un premier effet néfaste : les hébergeurs devront alors avoir une obligation de surveillance sur les utilisateurs et leurs services.

Or, en 2012, la CJUE avait déjà interdit cette pratique indiquant qu’elle était contraire au droit européen et dangereuse pour le respect de la liberté d’expression et de la vie privée. « Nous avons besoin d’une réforme du droit d’auteur qui rend l’Europe adaptée au 21e siècle. Nous avons maintenant une proposition qui est un poison pour la liberté d’expression, un poison pour les entreprises européennes, et un poison pour la créativité » a déclaré Joe McNamee, le directeur exécutif de European Digital Rights (EDRi).

Les artistes-interprètes, les premiers oubliés

Depuis plusieurs années, et ce, dans toute l’Europe, les artistes-interprètes voient leurs droits disparaître. Dès lors qu’un contrat est signé, les droits des artistes sont cédés aux producteurs en échange, pour une petite minorité, d’un paiement prenant en compte le résultat d’exploitation. Mais dès que leur production s’affiche sur internet, par l’intermédiaire de sites de streaming ou de téléchargement, selon Le Monde« 95 % des artistes interprètes ne reçoivent aucune rémunération spécifique ».

Face à ces problèmes récurrents, la directive droit d’auteur souhaite créer une obligation de transparence des contrats. Lors de la signature d’un contrat, les artistes se voient dans l’obligation de céder l’intégralité de leurs droits sur leurs exploitations en contrepartie de leur cachet. Cela entraîne toute cessation de droit concernant les exploitations présentes sur les plateformes de streaming et de téléchargement. Pour palier le problème, la Commission a ensuite créé deux types de catégories d’artistes. On y retrouve ceux dont la contribution est « significative » et qui pourraient bénéficier de cette transparence, et ceux dont la contribution n’est pas « significative », qui ne pourront en bénéficier. Les critères permettant le « classement » d’artistes ne sont pas encore connus et seront définis par chaque Etat membre. De plus, devant la lourde tache administrative que cela pourrait représenter, les Etats membres pourront aussi écarter cette obligation de transparence.

La seconde mesure permettrait à un artiste, qui estimerait que la rémunération indiquée dans son contrat est disproportionnée par rapport à son travail, de réclamer une rémunération complémentaire. A ce stade, la Commission européenne n’a pas indiqué plus d’informations quant à la manière dont l’artiste devra s’y prendre. Impuissante face aux réels problèmes de la transparence des contrats, l’Union européenne n’a pas su trouver de réelle solution et a créé une discrimination entre les artistes-interprètes et les auteurs, en mettant en place deux types de catégories d’artistes.

Alors qu’elle vient d’être proposée par la Commission européenne, la nouvelle révision de la directive droit d’auteur semble déjà être rejetée par les principaux intéressés. On y voit, ici, une occasion ratée pour la Commission européenne de vraiment moderniser cette directive en y insérant des droits nouveaux. Une seule chose est sûre, la proposition de directive sera soumise à de nombreux débats lorsqu’elle sera proposée au Parlement européen.

 

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